le héros de 7 ans
Il était une fois, dans la Provence millénaire, la guerre qui s’éternisait. Ho, bien sûr, ce n’était pas tout les jours : les deux grands événements militaires de la commune sont le massacre d’un maquis dans la colline voisine et l’assassinat de notre député, nous en reparlerons peut être une autre fois…
Par contre, il passait de temps en temps des convois allemands ; imaginez ce qui pouvait se passer dans la tête des gamins de cette époque ! C’était leurs jeux de cow-boys et d’indiens qui prenaient forme sous l’apparence des uniformes vert rezeda, enrichi par les conversations des parents le soir à voix basses.
C’était très simple
, les bons c’était nous en paysans, les méchants eux, « les envahisseurs » en bottes cirées. En fait, ni collabos ni résistants la plupart cherchaient à arriver à la fin le mois mal possible et vivant ; il faut des dizaines d’années pour avoir l’idée de baptiser un lycée « De Gaulle » ou « Jean Moulin ».
Mais revenons à nos gamins, et plus exactement au petit EC que nous avons déjà vu ;ce jour là est arrivé au village un convoi entier de soldats allemands, accompagnés de side-cars et tout…Les gamins sont intenables,plus émerveillés qu’apeurés. En cinq minutes la décision est prise : ce sera un acte héroïque, sinon rien ; l’occasion est trop belle, ils viennent nous défier chez nous !
Les camions rutilants sont rangés sur le cours(l’artère principale du village) ; c’est d’autant plus spectaculaire qu’il n’existe que 2 camionnettes dans le villages (celles des bouchers).
Le petit EC a pris sa décision : il va crever les pneus de tous les véhicules de la colonne !
Il court chez sa mère, « emprunte » deux grandes aiguilles à coudre les matelas, les cache dans ces vêtements ( ce qui n’est pas aisé : il en a si peu !) et profite de sa petite taille pour se cacher sous un camion.
Le voila en train d’essayer d’enfoncer son aiguille dans le pneu grand comme lui ;il transpire, plus de peur que de chaleur, sort la langue sur le coté de la bouche ; mais autant tenter de la planter dans un caillou ; la tête de aiguille lui rentre dans la paume de la main et lui fait mal.
Finalement, il renonce, sort de dessous le camion, comme il est rentré.
Il recommencera une autre fois, quand il sera plus grand, si la guerre n’est pas finie.
C’était courageux, pour un gamin de 7 ans,et risqué pour le village s’il se faisait prendre ;la sanction est venue quand même sous la forme d’une fessée de sa mère, quand il a ramené les aiguilles en forme de W…